Plat du jour - Société

F.I.E.F, le lieu de Victor Mercier né sous le signe de l’Hexagone

Ecrit par Saliha Bala le 21.01.2020

Victor Mercier est arrivé en 2018 dans les cuisines de l’émission Top Chef après avoir fait un tour du monde gastronomique dans un soucis écologique. Toujours avec le même esprit, il a ouvert il y à quelques semaines un restaurant d’un nouveau genre dans Paris, F.I.E.F où le bilan carbone est réduit à son minimum.
 

 

Façade épurée, décoration élégante et minimaliste, entrer chez F.I.E.F., c’est entrer dans un lieu qui appelle à la détente et à l’éveil des sens. Victor Mercier est un chef dont le visage est familier, il a été finaliste de Top Chef 2018 face à Camille Delcroix. Avec sa pétillance et son énergie à toute épreuve, le jeune chef a mis à profit son passage télé pour tenter l’aventure d’un restaurant qui allie une cuisine qu’il aime aux enjeux cruciaux de l’urgence climatique, puisque F.I.E.F. est né de l’envie de soutenir l’agriculture et les terroirs français. Mieux : hexagonaux ! F.I.E.F signifiant Fait Ici En France, Victor Mercier souhaite offrir toute la richesse que notre territoire national peut produire.
 
Il est vrai que la France a la chance de jouir, au sein même du climat tempéré où elle s'inscrit, d’une multitude de climats qui fait que les terroirs sont si prolifiques et variés, du Nord au Sud. Pourquoi aller chercher ailleurs ce qu’on peut avoir au pied de chez soi ? Tel est le pari de Victor Mercier.
 
Secondé par une équipe efficace et avenante, d’un mixologue virtuose, Stephen Martin et de la sommelière Fleur Godart, attentive et précise, le chef a également laissé carte blanche à son architecte afin de créer deux salles au sein du restaurant : un comptoir confortable et inspiré de ses voyages au Japon et au Pérou pour la carte gastronomique, d’une part et une salle classique et tout aussi cosy pour la bistronomique, d’autre part.
 
La cohabitation des deux concepts est naturellement plus fatigante : le chef doit gérer son équipe afin de sortir sa cuisine avec des cuissons maîtrisées afin que la qualité soit au rendez-vous dans les deux salles, et ce, malgré les sollicitations de la clientèle au comptoir, voire simplement, la plus grande concentration due au regard permanent de celle-ci. Son ambition est de créer et de faire cohabiter les deux espaces sans démarcation, afin de susciter la curiosité et donner l’envie de revenir, à raison.
 
Le chef se fait un point d’honneur à être transparent jusqu’au bout de la casserole puisque les convives peuvent tout voir de l’activité en cuisine. Cette transparence littérale va de paire avec l’origine des produits de la carte, tous et purement hexagonaux. La Corse, étonnament, ne figure pas sur la liste des fournisseurs, parce que le bilan carbone est trop lourd d’après le cahier des charges fixé par Victor Mercier et ses équipes : « Pour une fois, il faut être radical et s’en tenir au concept »nous avoue-t-il. 
 
Il en va ainsi de toutes sortes de produits dont nous avons tant l’habitude mais qui nous viennent de si loin : exit la vanille, le café, le thé et certaines épices. C’est à force de recherches et de contacts privilégiés que le chef a pu se constituer un herbier et une bibliothèque d'une quarantaine d’épices et condiments, voire remettre un coup de projecteur sur certains goûts et produits longtemps délaissés car considérés comme moins nobles.
 
Ainsi le mélilot, surprenante plante médicinale, vient se subtituer à la vanille pour réveiller une onctueuse crème glacée. Un producteur Gersois, passionné d’épices fournit le restaurant en poivre du Sichuan qu’il a réussi à acclimater sous nos contrées, on ne peut que se réjouir de voir une telle diversité et de tels goûts dans les assiettes.
 
Justement, dans l’assiette, côté comptoir, on a le plaisir d’avoir tous les sens sollicités et ravis. Un menu unique en six temps, de l’entrée au dessert, est servi. On voit toute cette ruche s’affairer à sortir des assiettes maîtrisées. Une cuisine très personnelle et nourrissante est servie de manière délicate.
 
La soupe de pain, qui est un des rares plats à être toujours à la carte, est à souligner parce qu’il importe au chef de réduire la quantité des déchets : cette préparation permet de passer le pain qui n’est pas consommé d'un service à l'autre. Des poissons comme la Vieille, souvent rejetée après la remontée des filets, est ici à l’honneur. Les portions sont plus ramassées mais on se nourrit : pas de gavage ni de gaspillage, que du plaisir !
 
La carte change régulièrement, au gré des arrivages des fournisseurs. Pour finir le repas, on proposera un « cafief », succédané de café à base de chicorée et sarazin toastés, sans caféine mais tout aussi réconfortant que le classique petit noir sur le zinc. On veut ici faire œuvre de pédagogie et de bon sens, par le choix des fournisseurs, des matériaux, le renoncement à des produits si ancrés pourtant dans la cuisine des restaurants.
 
Ainsi, un chef comme Victor Mercier, avec un concept aussi fort que le local pur arrive, une bouchée après l’autre, à se détacher de l’étiquette « Top Chef » pour pleinement mettre dans l’assiette sa vision de cuisinier et sa vision de ce que devrait être une cuisine délicieuse, simple et respectueuse d’un environnement bien malade et qui pourrait trouver son remède ainsi.
 
Clairement touché par les incendies qui ont dévasté l’Australie, F.I.E.F. a annoncé sur ses réseaux qu’il reverserait tous les mercredis du mois de janvier 10% de ses recettes à la levée de fond Australia Wildlife en soutien aux victimes des feux. Ils annoncent également vouloir mettre en place ce type d'opération à plus long terme avec chaque mois une ONG différente.
 
À la fin du service, les équipes nettoient tout au vinaigre blanc et comme les quantités d’emballages sont pensées pour êtres réduites à leur minimum, le ménage se fait vite et bien : caisses en bois, moins de polystyrène pour le transports des produits de la mer, présence d’un compost sur place. On est vertueux ou on ne l'est pas !
 
Que de bonnes raisons de s’offrir et d’offrir un temps de qualité chez F.I.E.F, qui pourrait, sait-on jamais, devenir un label, en France et ailleurs ? C’est l’ambition de son fondateur, ambition qu’il est souhaitable de voir faire des petits, afin que notre monde globalisé soit plus juste et que des pratiques responsables, telles que les promeut F.I.E.F devienne la norme.
 

 

F.I.E.F
44 Rue de la Folie Méricourt,
75011 Paris


Tarifs : 

Menu gastronomique au comptoir en 6 plats (sur réservation): 68€ par personne hors boisson.

Menu en salle : à la carte.

 

Mots-clés : Victor Mercier - FIEF restaurant Paris - Camille Delcroix

 

Retour en haut

https://7detable.com/article/societe/f-i-e-f-le-lieu-de-victor-mercier-ne-sous-le-signe-de-l-hexagone/2859