Plat du jour - Société

« Des Quiches et des hommes », quand cuisinent Kadoc, Karadoc et Perceval

Ecrit par Fred Ricou le 17.04.2020

Si le nom de Brice Fournier ne parle pas forcément, son rôle de Kadoc, le frère de Karadoc a profondément marqué les fans de la série Kaamelott d’Alexandre Astier. Lyonnais, il est également restaurateur depuis plusieurs années, avant même d’avoir commencé à jouer la comédie. Sur Facebook, il lance une série documentaire foutraque où il réalise une recette avec un invité : Des Quiches et des hommes.

 
Avant de parler de Des quiches et des hommes, j’aimerais vous demander de quelle manière vous vous voyez : comme un acteur-restaurateur ou comme un restaurateur-acteur ?
Je n’ai pas de choix à faire. J’ai longtemps vécu aux États-Unis et les gens, là-bas, s’en foutent royalement. Ils changent facilement, que ce soit l’âge, le métier ou la région. Pour moi, cela a été un choc culturel quand j’y ai vécu. Changer de métier, faire deux métiers, on s’en fout ! Moi, j’ai besoin de faire les deux ! 

Quand vous vous présentez à quelqu’un qui ne vous connaît pas, que dites-vous ? 
Cela dépend de ce que je suis en train de faire à ce moment-là… (rire). Quand j’étais juste restaurateur et que j’ai commencé à jouer, on échangeait beaucoup, et les mecs ne comprenaient pas « ha ouais, t’es restaurateur, mais t’es pas comédien en fait ! », donc j’ai arrêté de dire que j’étais comédien / restaurateur ou restaurateur / comédien. Jusqu’au jour où je n’ai plus eu besoin de me justifier… Mais les deux m’enrichissent ! J’ai vu sur scène Tim Robbins aux Nuits de Fourvières avec un orchestre et son fils à la guitare… l’art, ça déborde ! Johnny Depp, Bruce Willis… En France, par exemple, Olivier Gourmet tient l’auberge de ses parents dans les Ardennes. Cela fait des acteurs plus riche, en général…

Comment est-ce que vous vivez la situation actuelle à la fois professionnellement et personnellement ? 
Quand on bosse beaucoup, même si l’on aime ce que l’on fait, il y a des moments où c’est trop. Il y a plein de moments, où quand on bosse le week-end et le soir, on rêve de moments comme cela. Un moment magique, utopique, où tout s’arrêterait pendant un mois, deux mois… et tout à coup, cela tombe du ciel ! Les gens sont là, stressés à vouloir sortir, j’ai envie de leur dire, mettez vous dans le canapé, réfléchissez, faites des trucs que vous ne faisiez pas auparavant. Il faut prendre le moment pour le moment… 

Quand vous entendez un chef comme Stéphane Jégo qui appelle depuis un mois le gouvernement à faire quelque chose pour les restaurants sinon 30 à 40% vont y laisser des plumes, vous en pensez quoi ? 
En ce qui me concerne, financièrement, je vais me démerder. Un emprunt d’état, un report des charges, on va passer le virage. Le problème n’est pas là, le virage peux se négocier. Le problème, c’est surtout que l’on était déjà précarisé avant, et qu’il y a plein de mecs qui étaient au bord du gouffre. Ils trimaient, ils payaient leur charge, ils s’en sortaient comme ils pouvaient. Ces mecs-là ne peuvent pas ! Je voyais aux infos un gars qui a ouvert son restaurant à Val d’Isère, il y a un an, avec toutes ses économies, il est en train de couler ! Il faut que ce soit fait en bonne intelligence… Moi, mon propriétaire m’a appelé en me disant « Vous payez quand vous voulez ! » et mon banquier m’a appelé aussi en me disant qu’il allait me prêter de l’argent… C’est un virage à négocier. Après, on tombe dans un truc sociétal : Est-que les banques institutionnelles ont compris l’enjeu ? Les multinationales et les banques sont devenues plus grosses que les états… Elles feront comme elles veulent, elles feront selon leur intérêt !

Vous croyez au Monde d’après dont on entend parler, qui ne sera plus le même que celui que nous connaissions avant le Covid-19 ? 
Ce qui est sûr, c’est que nous n’avons pas le choix. S’il arrive, tant mieux, s’il n’arrive pas, tant pis. L’adage qui dit : « L’Homme est un loup pour l’Homme », je ne pouvais pas imaginer l’Homme méchant, ou bête quand j’étais enfant. Mais là, nous y sommes ! 

Pour revenir à Delicatessen, votre restaurant, je crois que vous avez tenté la livraison à Lyon, comment cela s’est-il passé ? 
Quand ils nous ont fait fermer le samedi soir, le dimanche nous avons organisé une vente à emporter qui a cartonnée, on a vidé les frigos, on ne savait pas à quelle sauce on allait être mangée. Avec mes équipes, nous sommes très proches. Ce sont des familles et mes gars se font chier chez eux… Nous avons réouvert pour faire de la vente à emporter, on a eu un peu de monde, mais je leur ai dit « Vous bossez pour rien et vous prenez des risques pour rien ! ». Là, on a arrêté, mais ils sont nerveux. C’est compliqué de faire de la vente à emporter. Notre resto n’est pas super adapté à ça… 

Alors, Des Quiches et des Hommes, comment est né ce début de série qui réunit bonne bouffe et amis ? 
Dans les émissions de cuisine, ils passent leur temps à mentir physiquement. J’étais invité dans une émission, le type était super cool… 3,2,1, ça démarre et là, le gars change complétement sa voix, tout ! Ce n’est plus le même ! Par exemple, j’adore Top Chef, mais quand ils font des voix off « et là, je décide de rajouter du beurre… blablabla », c’est pas naturel. J’avais envie de faire ça… avec de vrais gars ! De vraies recettes ! Et puis dire des conneries et rigoler…

Est-ce que vous vous reprenez quand vous tournez ces émissions ? Vous dites un truc, ça ne va pas, coupez ! On l'a refait… 
Ha non ! Nous, on garde nos conneries ! Un metteur en scène a dit un jour : « Le cinéma, c’est poser la caméra et attendre l’accident ! ». Avec Jean-Christophe Hembert, qui est mon super pote (ndlr : le fameux Karadoc de Kaamelott), la première Quiche a été complètement improvisée : « Tiens, si on allait au marché de la Croix Rousse ? Tiens, si on faisait ça ! » on avait pas mal d’images, donc on a fait ce que l’on sait faire, on l’a montée. La musique, c’est un pote, c’est né comme ça, un peu tout seul. La deuxième, nous avons eu un producteur qui a trouvé un endroit. On a un peu chiadé le truc, on avait trois-quatre caméras. On a déplacé une équipe pour aller aux marchés aux veaux… Entre le premier et le deuxième, il y a juste un peu plus de technique… Le schéma entre l’invité et moi est exactement le même. Pour l’instant, je suis tenu à avoir un invité pour qui j’ai de l’affection, qui va me donner quelque chose, pour l’instant, c’est ça ! Le prochain, ce sera Poulpe. Je m’entends super bien avec lui, il est génial ! On devrait aussi faire une interview par Skype autour du confinement avec Grégory Cuilleron, je ne le connais pas encore, mais on s’est eu au téléphone et je le trouve marrant. On devrait faire un poulet à la crème par voie de Skype, on va voir ce que cela donne !
 

Vous avez commencé par un sujet très « sérieux » : la Quiche ! Pourquoi ce choix ?

La quiche, c’est l’une de mes passions ! C’est devenu un gimmick à force. D’ailleurs dans mon adresse mail perso, il y a le mot « quiche ». Avec Jean-Christophe Hembert, on avait bien déliré dessus et l’on voulait faire une appli mondiale des meilleures quiches, comme un guide touristique. On avait noté une quiche 17/20 à Nantes… et puis ça ne s’est jamais fait parce que c’était trop bête ! Mais c’est resté. Et quand j’ai lancé ça, la première recette c’est une quiche… encore que non, il y a un numéro 0 sur Youtube avec Davy Mourier où l’on a fait une blanquette et l’on a… le cul à l’air. Maintenant, on sait plus où l’on va. On a de bons montages, de bonnes musiques, maintenant mon ambition est de faire le mieux possible… Il faut que les épisodes me fassent rire, je suis un peu l’étalon. Je fixe mes règles et si ça me fait rire, ça marche. Ce sont des petits moments qui… dans l’épisode 2 avec Franck Pitiot, quand on le voit jouer de la guitare, il est tout jeune, il est ridiculissime, ça le fait marrer, il m’a donné le film tout de suite. En revanche, la photo avec son grand-père, celle-là, il ne voulait pas… j’ai mis 15 jours à lui arracher des mains…
 


La bouffe permet de dire des choses ? 

Ouais. Après on s’est longtemps posé la question de ce que l’on devait privilégier. La recette ? L’invité ? Moi ? On n'a pas encore réussi à répondre. Finalement tout cohabite pas mal, parce que les gens refont les recettes…

 

Pour officiellement démarrer l’émission vous avez donc demandé à deux amis de Kaamelott de vous rejoindre, vous n’avez pas peur que cela fasse très Kaamelott justement ? 

Je ne voudrais pas que ce soit trop estampillé Kaamelott. On se croise et l’on s’aime beaucoup, à Lyon, mais ce n’est pas la vie en communauté que les gens pensent parfois. J-C Hembert, lui qui refuse tout a accepté tout de suite. C’est le mec le plus drôle au monde… mais il faut tomber dessus, c’est quand il a envie ! Et quand j’ai fait des voix dans le studio voix de Pitiot, je lui ai proposé, il était aussi partant. Là, pour Poulpe, même si c’est compliqué pour lui dans sa tête, il est chaud pour le faire… 

 

Pour les premières émissions, ce sont des amis qui cuisinent avec vous et après ? 

C’est ma grosse question. J’en ai encore deux trois en tête, mais je me dis que cela ne va pas m’empêcher d’avoir des affinités avec des gens que je connais moins bien. Ce sera le cas pour Cuilleron, justement… Après, il faut quand même que les invités n’aient pas peur de moi, qu’ils ne soient pas choqués si je dis une connerie, etc. 

 

Il y a un beau travail d’image et de montage, est-ce que c’est prévu uniquement pour rester sur Facebook où vous prévoyez de le proposer à des chaines de télé ? 

Je pense que la télé est déjà morte sans le savoir. Aucun de mes cinq enfants ne regarde la télé et le plus grand a 25 ans. Moi, je ne suis ni pour ni contre, ce qui m’arrête c’est de faire de la merde. Si on me dit ok à la télé, mais que « on fait ça, ça et ça. On fait 7 minutes 40… » ça moi, je ne sais pas faire ! S’ils m’invitent un mec qui n’est pas cool, je ne saurais pas quoi lui dire… 

 

Allez, question bonus : est-ce que l’on va avoir la joie de vous redécouvrir en Kadoc dans le film Kaamelott qui devrait sortir au milieu de l’été ?

Je n’ai pas le droit de le dire. Moi j’ai signé un contrat de confidentialité et le mec qui n’est pas dedans, n’a rien signé, si vous voyez ce que je veux dire… 

L'épisode 2 avec Franck Pitiot sera en ligne dimanche 19 avril sur la page Facebook de l'émission

Le restaurant de Brice Fournier
Delicatessen
6 Rue de Savy,
69001 Lyon

 

Mots-clés : Brice Fournier - Acteur Kaamelott - Restaurateur Lyonnais

 

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