Depuis 2014, Alan Taudon fait partie de l’équipe de l’Orangerie, le troisième restaurant gastronomique du Four Seasons Hotel George V. Début juillet, il en prend les commandes après le départ du chef David Bizet pour le restaurant Taillevent. Ainsi, l'on passe d’une cuisine de tradition à une cuisine de voyage, féminine et élégante.
Alan Taudon - 7 de Table.com
Le Four Seasons Hotel Georges V est l’un des plus beaux palaces parisiens. Trois restaurants, trois genres de cuisine très différents. D’un côté Le Cinq du chef Christian Le Squer, triplement étoilé, d’un autre Simone Zanoni au George pour une cuisine gastronomique italienne, une étoile et le dernier L’Orangerie, lancé en 2016, également étoilé.
En 2010, c'est après être passé par les cuisine, entre autres, de Sylvestre Wahid à l’Ousteau de Beaumanière que Alan Taudon croise la route de Christian Le Squer dans les cuisines de Ledoyen. Quelques années plus tard, il le suit au Cinq en tant que responsable du pôle Recherche & Développement avec qui il obtient la troisième étoile du restaurant.
En juin dernier, David Bizet jusque-là chef de l’Orangerie, belle verrière à l’intérieur du Palace, annonce qu’il s’en va au Taillevent. Qui va alors le remplacer ? Christian Le Squer explique : « J’ai exprimé mon souhait de faire quelque chose de plutôt végétal, dans le monde marin. J’avais des personnes dans mes équipes qui tenaient un trois étoiles depuis longtemps, il était évident qu’une promotion en interne était beaucoup plus évidente qu’aller chercher à l’extérieur ». C’est ce qu’il s’était déjà passé au moment où David Bizet avait pris lui-même les commandes de l’Orangerie.
Pour cette nouvelle carte plus légère, plus dans l’air du temps, toute l’équipe a travaillé avec Alan Taudon « Je ne voulais pas que l’on travaille individuellement. Quand Alan a besoin d’un conseil ou d’une vision, tous nos palais sont collectifs, c’est très important. Un chef c’est une équipe » continu Christian Le Squer « La cuisine de David, c’était une cuisine à la Française, avec des sauces… Ici, la cuisine d'Alan est plus végétale. C’est aussi une cuisine de voyage avec différentes saveurs. On fait aussi des sauces, mais sans matière grasse. Autre exemple, on met des corbeilles de fruits avant les desserts… On veut que les gens se sentent bien en sortant du restaurant ». C’est donc une cuisine healthy, le mot est lâché, mais surtout très gastronomique. Les saveurs y sont fines, légères, féminines…
Pour Alan Taudon, reprendre les cuisines de l’Orangerie est une très grande fierté : « C’est une très belle récompense pour moi. Je connais Christian Le Squer depuis tellement longtemps que s’il me le propose, c’est qu’il a confiance en moi ». Pour cette cuisine healthy, Alan Taudon, comme le dit Christian Le Squer, a particulièrement travailler les sauces « C’est avoir le goût parfait, intensifier les arômes d’un produit et trouver une texture. Pour la langoustine, par exemple, on épaissit la sauce avec l’eau de cuisson du riz, au lieu de la monter au beurre. »
C’est véritablement une ligne de conduite axée sur le voyage, les excursions, qui ont permis de tracer la carte : « Quand vous êtes cantonné à faire de la cuisine française, ou de la cuisine classique, vous êtes obligé de suivre une ligne de conduite qui est assez resserrée. On m’a dit : "Tu me fais une cuisine de voyage ! ", ça peut aller partout ! Je vais en Asie, le lendemain en Amérique Latine… J’adore voyager, j’ai fait plusieurs fois le tour du monde, de la Scandinavie à la Polynésie en passant par les Caraïbes, j’ai fait l’Amérique Centrale, l’Amérique Latine, je suis toujours allé vers la street-food, les produits du terroir. Je suis allé dans les familles, voir ce qu’il s'y passe. C’est là que l’on apprend la vraie gastronomie, toute cette palette de parfum ».
Pour tout ce qui est sucre, Alan Taudon travaille avec Maxime Frédéric : « Maxime faisait déjà des desserts qui étaient exceptionnels. Il n’y avait pas beaucoup de choses à toucher. Notre seule ligne de conduite était de diminuer le sucre. Il a été flexible et a réussi avec brio. Quand on voit le vacherin, les desserts sont magnifiques ! » Maxime Frédéric tout juste 28 ans est passé par le Meurice avant de prendre les rênes sucrées du prestigieux Four Seasons. Un challenge que ce jeune normand a relevé haut-la-main. Inventif, précis, audacieux, il propose une carte sucrée toute en finesse et légèreté. Les desserts bousculent nos sens, les surprennent en une explosion de saveurs délicates. Sa réinterprétation du vacherin est d’une réelle audace, alliance de croquant avec des tuiles meringues d’une rare finesse, de rondeur avec la crème glacée vanillée et de fraîcheur explosive avec en son cœur un sorbet d’herbes qui anime le dessert d’une vivacité surprenante ! Ce dessert très beau, délicieux, est posé telle une œuvre au cœur d’une assiette aux rondeurs de vague océane en porcelaine de Limoges dessinée par Maxime, lui-même. Six mois de travail pour cet écrin qui magnifie ce dessert dont le montage nécessite 3 minutes, les pétales de meringues sont posés un à un. Les tuiles meringuées à elles seules nécessitent 2 heures de préparation journalière. Ce n’est plus de la pâtisserie, mais de la haute joaillerie pâtissière. Les desserts de Maxime Frédéric sont une poésie gourmande.
Une carte allégée en gras et en sucre, mais toujours un amour des produits de saisons : « On travaille de mèche avec nos maraîchers qui sont en Ile-de-France, parce que je veux être le plus proche possible des produits. » Alan Taudon va, comme beaucoup de ses confrères, improviser avec les produits que les maraîchers, lui proposent. Et c’est la même chose pour les produits de la mer « En ce moment, la Saint-Jaques démarre, on en met une, pareil pour les oursins ».
Pour créer, Alan Taudon l’avoue : « J’ai la chance d’avoir une équipe exceptionnelle » et ajoute « En recherche et développement, on est toujours en recherche de l’originalité et des saveurs nouvelles. Pour le choux, quand je vois cette poitrine de cochon typique de la Bretagne, on va la mélanger avec une petite sauce que l’on avait trouvé en Corée, faite de jus de poire, de jus de prune et de sésame, cela fait toute la différence… »
Et c’est vrai qu’elle est délicieuse cette poitrine de cochon. La langoustine, bouillon de riz au yuzu est une intelligente réinterprétation d’un sushi, le rouget en écaille et gnocchis de tomate est une belle surprise gustative, tandis que le boeuf wagyu, pomme soufflée au nori est incroyable aussi bien dans la cuisson que dans les saveurs.
Les plats de l’Orangerie vont de 30 à 75 euros. On est ici dans une belle gastronomie à la fois simple et complexe. C’est un petit plaisir que l’on peut s’offrir pour une jolie occasion, un lien qui tend doucement vers le Cinq, une sorte de petite frère voyageur sur lequel on peut compter. L’endroit est sublime, c’est un petit joyau dans un lieu ultra prestigieux. On y est comme dans un rêve que l’on ne veut absolument plus quitter…
Avec la collaboration sucrée de Samantha Honung
Restaurant L'Orangerie
31 Avenue George V
75008 Paris
Mots-clés : palace george V - nouveau chef - Alan Taudon