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« L’Éternelle Création », une oeuvre d'art au coeur des vignes

Ecrit par Le Comte De Monte-Cuisto le 27.09.2018

La vigne a souvent été la muse des artistes. Beaucoup se sont inspiré des entrelacs naturels des sarments de vignes pour leurs œuvres. Une œuvre d'art en plein milieu d'un vignoble, c'est le beau projet qu'à eu Alexandre de Malet Roquefort, le propriétaire de la Gaffelière et l'artiste contemporain Philippe Pasqua : « L’Éternelle Création »

 

« L’Eternelle Création » est l’aboutissement d’une rencontre il y a plusieurs années entre le propriétaire de La Gaffelière Alexandre de Malet Roquefort -8ème génération aux commandes la propriété- et l’artiste contemporain Philippe Pasqua. Un homme du vin et un homme de l’art, chacun ne maitrisant pas précisément le domaine de l’autre, mais qui se retrouvent autour de valeurs communes : transmission, enracinement,...


L’idée d’une sculpture en fusion avec la vigne qui évoluerait dans le temps pour laisser une trace aux générations futures éclot alors.

La création de l’œuvre débute en juillet 2017 par l’arrachage de 27 pieds de vigne issus de la prestigieuse parcelle de la Boulangerie. Les pieds sont ensuite transférés dans l’atelier de l’artiste près de Lisbonne où 8 mois de travail sont nécessaires à la création de moules spéciaux
 

pour reproduire les différentes parties du cep de vigne. Chaque feuille est unique ! Les branches et feuilles sont enfin soudées sur place.

La première étape de l’installation de l’œuvre est en place depuis le 21 septembre 2018 et se poursuivra jusqu’à fin octobre. 27 pieds de vignes en bronze chromés seront alors enracinés au cœur de La Gaffelière.
 

Interview croisée entre Alexandre de Malet Roquefort et Philippe Pasqua
 

Comment est née cette idée ?

Alexandre de Malet Roquefort : L’œuvre in situ de Philippe Pasqua, dont nous révélons aujourd’hui la première phase, est un lien symbolique entre l’héritage de La Gaffelière et sa modernité. Je poursuis le travail de mes aïeux, mais je veux me projeter dans l’avenir avec un artiste de ma génération. A partir des années 2000, j’ai fait ce que mon père et mon grand- père avaient fait avant moi : rajeunir la vigne. Toutes les vieilles vignes ont été supprimées. Le vignoble est maintenant dans un état grandissant, chaque année il prend une année de maturité. Nous aurons bientôt achevé les trois-quarts de réencépagement de La Gaffelière. Nous avons également investi dans un nouveau cuvier et un nouveau chai au début des années 2010. J’avais pour idée de valoriser une parcelle très symbolique de La Gaffelière en exprimant artistiquement l’âme de la propriété. J’ai donc demandé à Philippe de créer une œuvre dans cette parcelle. C’est l’une des plus anciennes et des plus emblématiques de La Gaffelière qui se trouve au plein milieu du « triangle d’or » de Saint Emilion.
 

Philippe Pasqua : Créer seulement une étiquette comme beaucoup le font ne m’intéressait pas. Je voulais participer à un projet plus fort, réellement exceptionnel, à plusieurs échelles de temps. Ce projet est dans la continuité de mon travail sur les vanités, le temps et la nature. J’aime les forêts. La vigne, c’est aussi une immensité végétale, plus ordonnée, avec des lignes, des matières et des couleurs. L’histoire d’un grand vin commence dans la terre, avec la vigne. Cette histoire primaire me parle. L’histoire de La Gaffelière me parle également, c’est une propriété marquée par le temps : la famille Malet Roquefort est propriétaire depuis 1705 et la vigne était présente sur les terres de La Gaffelière au IV siècle.
 

Quels liens trouvez-vous entre l’art et le vin ?

Philippe Pasqua : Quand nous avons parlé de cette création, la vigne a tout de suite été une évidence. Comment exprimer la fusion entre l’art et le vin autrement que par la vigne ? La vigne m’inspire. Je ne cherche pas à conceptualiser. La simple idée de visualiser une vigne qui deviendra éternelle par sa présence dans ce vignoble me suffit. Un pied de vigne c’est sublime. Je vois sa réalité, et, en même temps, dans ma tête je vois ce que je vais faire différemment. J’aime reproduire à ma façon quelque chose qui existe dans la nature. Personne n’a jamais associé l’art à un vignoble de cette façon aussi fusionnelle. La sculpture irréelle va se mêler à la terre de la vraie vigne, celle du vignoble qui perpétue la vigne. Ma vigne, comme fossilisée, va devenir immortelle. Eternelle. L’œuvre reviendra ainsi à la nature, dans son élément originel. Chaque pied est unique et provient d’un vrai pied de La Gaffelière. La vigne de La Gaffelière se mêlera à l’œuvre et vice versa. Elle restera éternelle au milieu de l’éternel recommencement de la vigne.
 

Alexandre de Malet Roquefort : Le travail de Philippe Pasqua dégage une énorme force. Il est puissant et de naturel, si proche des vins fins et racés que nous aimons. Depuis des générations, notre famille revendique une signature de vignerons, typiquement française, liée à nos terroirs. Nous ne cherchons pas à être à la mode. L’art de Philippe Pasqua ne peut pas plaire à tout le monde. Tout comme nous ne forçons personne à aimer les vins de La Gaffelière, il ne force personne à apprécier son art, mais notre signature se reconnait. Qui nous aime, nous suive. Chaque jour, l’un comme l’autre, nous travaillons, nous vivons notre passion intensément.
 

Philippe Pasqua : Souvent, dans un lieu ou un objet, les gens cherchent d’abord la symbolique. Moi, je vois leur beauté et la vie qu’ils respirent. Un pied de vigne, c’est beau, tout simplement, puissant et vulnérable, dépendant de la nature. C’est le soleil qui donne au vin sa maturité. Je me retrouve dans cette forme de création. Les énergies sont plus positives. Mon travail est d’ailleurs très marqué par la lumière. Je crois que le vin et l’art sont liés par une idée d’éternité.

Alexandre de Malet Roquefort : Quand je me lève le matin, je me dis que je veux faire du bon vin et transmettre le vignoble à mes descendants. En cela, avec Philippe Pasqua, nous sommes semblables. Il pense à l’éternité, ses œuvres resteront. J’ai appris de mon père que les grands millésimes durent 100 ans. Récemment, nous avons dégusté une bouteille de La Gaffelière 1904. Les grands vins se bonifient. Le vin est un art. La nature nous donne le raisin mais la main de l’homme joue un grand rôle. Chaque millésime est unique.
 

Quel souvenir gardez-vous de votre première rencontre ?

Alexandre de Malet Roquefort : C’était en 2011, devant un dessin, celui d’un chien sur le dos, dans une posture presque humaine, confiante. On ne voit pas sa tête, il n’a rien de vraiment beau, mais j’adore ce chien. Puis, j’ai découvert les sculptures d’oliviers. Leur beauté éternelle est étonnante. Lorsque nous nous sommes rencontrés, j’ai été surpris par la simplicité et la spontanéité de Philippe Pasqua. Finalement, notre histoire est d’abord une rencontre d’hommes.
 

Philippe Pasqua : Nous avons tout de suite senti que nous avions une même vision de la création. Nous avons parlé du temps qui passe, de la nature, de la métamorphose. J’aime ressentir cette énergie qui peut se produire entre deux personnes. A vrai dire, je ne bois quasiment jamais de vin. Mais le métier de vigneron me fascine, ce sont des gens solitaires, qui vivent avec la nature. La vigne et le vin sont ce que sont les vignerons.
 

Alexandre de Malet Roquefort : J’ai appris à aimer ses œuvres, j’aimerais lui apprendre à apprécier le vin. Je ne peux plus me passer de la Vanité que j’ai dans mon bureau, je le regarde souvent. Je pourrais maintenant admirer cette Eternelle Création dans les vignes du Château.

 

Mots-clés : oeuvre d'art - vigne vin - artiste nature

 

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