Critiques - Pour apprendre

La coquine du pré : l'asperge, cette pointe d'amour

Ecrit par Frédéric Beau le 28.05.2016

Elle est blanche ou verte, traîne une vilaine réputation d’après repas, mais reste de par sa chair, absolument délicieuse. L’asperge est en pleine saison actuellement et plutôt que de plonger dans des légumes importés des quatre coins du monde, les producteurs locaux en ont de pleines cagettes. Cette grande branche de bonheur et de plaisir de table a notamment pour vertu d’être très facile à utiliser à chaud, comme à froid. Pourquoi se priver ?

 


Oliopeper, © 7 de Table
 

Originaire du bassin méditerranéen, l’asperge existe d’abord à l’état sauvage, verte et très fine. C’est une plante vivace qui se développe sous la terre (de préférence sableuse) en étoile, chaque année des rhizomes prendront la direction de la surface, et les bourgeons à peine sortis seront sauvagement coupés pour finir dans nos assiettes. Si pendant que ces bourgeons tentent désespérément de rejoindre la surface, on les recouvre de terre pour les priver de lumière, les asperges resteront blanches, si au contraire on les laisse pointer leur nez à la surface, les asperges deviendront vertes. En pratique pour des raisons de production, il s’agit d’espèces différentes.

La bête est une plante rustique, qui, même si elle préfère des sols sableux, s’adapte à beaucoup de terres et de climats. C’est pourquoi aujourd’hui à l’échelle mondiale, elle est cultivée en Chine (1er producteur), au Pérou et au Chili. Consommée depuis l’antiquité par les Grecs et les Romains pour diverses raisons, elle fut délaissée au Moyen Âge pour sa réputation quelque peu grivoise. C’est entre le XVe et le XVIIIe siècles que l’on instaurera de nouvelles techniques de culture poussées.

 

Comme souvent ceux qui n’avaient pas trop envie d'en manger ont tenté de lui associer des vertus d’aphrodisiaques, bien plus en raison de son aspect et de sa forme... Mais soyons sérieux : comment une plante dont le mâle donne des fruits stériles pourrait être aphrodisiaque ? À bien y réfléchir, on rapprocherait bien son nom du verbe asperger… mais l'étymologie serait fausse et l'on s’égare. Son nom vient du latin « asparagus », lui-même dérivé du grec asparagos, et désigne une plante qui jaillit. De là à imaginer l'asperge se dresser phalliquement, il n’y aurait qu’une pousse...
 

Madame de Pompadour en raffolait pour les mêmes supposées vertus aphrodisiaques, tellement qu’elles se surnomment alors « pointes d’amour »… Tout un programme. La cour de France s’en délecte, au point de lui trouver de multiples appelations pompeuses comme on savait le faire : « légumes royaux », « printemps en tige », etc. Après le XVIIe siècle, beaucoup de variétés apparaissent en Europe, essentiellement dans le but d’obtenir une période de production plus étendue. Certaines deviendront un temps célèbres, comme l’asperge d’Argenteuil – où elle n’est plus cultivée –, mais aussi la Violette de Hollande, et quelques autres. Mais c’est finalement « L’Asperge des Sables des Landes », la seule à être labellisée, IGP.

Ce légume longiligne de printemps inspirera par exemple le peintre Édouard Manet.




Peut-être même aurait-elle pu envisager une carrière au cinéma...
 

Un meurtre sans des ciseaux qui brillent est comme des asperges sans sauce hollandaise. Sans goût. Alfred Hitchcock.


 

Pleine de fibres (évidement) quelques vitamines et des oligo-éléments, elle est diurétique et dépurative. Et laisse quasi immédiatement après la consommation une odeur caractéristique à l’urine due à quelques composés souffrés. Pas top aphrodisiaque, il faut l’avouer. Elle reste évidemment un peu coûteuse par rapport à d’autres légumes : le processus de ramassage est en partie responsable, car la douce ne peut être récoltée qu’à la main.

 

Pour ce qui nous intéresse, c’est-à-dire ce qui se met dans l’assiette, l’asperge doit être achetée bien ferme et craquante, presque cassante. Les pointes doivent être bien serrées, elles le sont en général un peu moins à la fin de la saison. La base de la tige ne doit pas être trop sèche, si un peu de jus sort lorsqu’on la presse sous les doigts c’est encore mieux.
 

On aura le plus souvent accès à 3 types d’asperges, la blanche qui n’a absolument pas vu la lumière, la violette dont seule la pointe a aperçu le soleil, qui est légèrement fruitée et un poil amer, et la verte qui, tellement contente d’avoir vu les rayons du soleil qu'elle en est un peu plus sucrée et n’aura pas besoin d’être épluchée.
 

Pour tous les types, il faudra prendre soin de supprimer ce qu’on appelle le talon, les 4-5 premiers cm opposés au bourgeon qui est en général dur et très fibreux. Il faudra ensuite les peler au moins la partie basse de la tige. La pointe étant le morceau le plus délicat. Les asperges blanches sont en général cuites à la vapeur, tandis que les vertes peuvent être potelées, ou même grillées. 

Il y a quelques dizaines d’années, on préparait souvent de petits ballotins d’asperges entourées de jambon de pays. Cette habitude disparaît de plus en plus, on considère aujourd’hui que la finesse de l’asperge s’exprime dans le plus simple appareil. Mais pour les amateurs de recettes ou de mélanges, les asperges s’accompagnent très bien avec l’œuf, le parmesan ou les fromages frais.
 

On présente souvent l’asperge blanche à la table familiale, pour être trempé dans une vinaigrette relevée et moutardée. Dans ce cas, 7 de Table vous recommandera d’essayer cette technique qui consiste à incorporer un jaune d’œuf cru à la vinaigrette, de monter le blanc en neige et de l’incorporer à cette vinaigrette à l’œuf. Cette méthode, donne une vinaigrette aérienne, et qui adhérera beaucoup plus facilement aux asperges qu’on y trempe.


Cependant notre préférence va sans conteste aux asperges vertes, juste poêlees à l’huile d’olive et à l’ail.

 

 

 

1— Brossez les asperges sous l’eau -2 — Enlever le talon, en général plus blanc -3 — Couper les asperges en tronçon 3-4 cm – 4 Ecraser 3 gousses d’ail – 5 — Faire cuire le tout dans une poêle à l’huile d’olive, avec une pincée de sel de Guérande à feu moyen (assez pour cuire les asperges sans que l’ail brûle) pendant 15-20 minutes en remuant régulièrement. Quand la pointe du couteau passe à travers. C’est prêt. Et à l’apéro c’est délicieux.
 

 

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