Critiques - Dans l'assiette

Cresson, mon gosse mon frangin, mon poteau, mon copain, tu m'tiens chaud

Ecrit par Gary Nicolas le 16.04.2016

Ses feuilles vert foncé sont charnues, mais point trop n’en faut, sa teneur en fer rendrait Popeye et ses boîtes d’épinard jaloux. Quant à ses capacités de reproduction, elles défient l’imaginaire, tant cette plante s’est déployée dans le monde entier, en milieu aquatique, sans même toucher terre. Elle gravit des sommets pour se hisser jusqu’à 2000 mètres d’altitude. Si l'on ne dit pas : "Fontaine, je ne boirai pas de ton eau", le cresson est une source de dégustation à laquelle on s'abreuve bien volontiers. Quant au Cresson fontaine, on ne vous raconte pas...


cresson
Yumi Kimura, CC BY SA 2.0

 

Dans les premiers temps de ses rencontres avec les hommes, on en fit rapidement un compagnon tant de cuisine que de médecine. Bien avant que des cultures de cresson ne soient mises en place, à partir du XIXe siècle, on le récoltait là où il poussait. Le père spirituel de la médecine, Hippocrate, le savait déjà : il ouvrit son premier établissement, selon la légende, près d’un ruisseau... où poussait du cresson. Aujourd’hui, on sait qu’il est particulièrement efficace pour prévenir de l’anémie – ainsi que du scorbut. Calcium, vitamine C, ou encore magnésium et zinc, en plus du fer, le cresson se défend très bien. 

 

Cependant, il vaut mieux éviter de le cueillir à l’état sauvage : du fait du milieu aquatique où il vit, le cresson peut abriter la douve du foie... un parasite que l’on ne recommande pas vraiment.

 

On attribue à Joseph Cardon, qui dirigeait les hôpitaux de la Grande armée, d’avoir décidé de cultiver la plante, au début du XIXe siècle. Il l’avait découverte en Allemagne, constatant qu’on la faisait pousser dans des bassins – imitant ainsi le modèle de croissance semi-aquatique. Toutefois, il semble bien que des cressicultures se retrouvaient en Normandie, dès le milieu du XVIIe siècle. Son nom actuel vient d’un dérivé du latin crescere – pousser, croître. Oui, croissance et cresson ont la même origine.

 

En revanche, s’il appartient à la famille des crucifères, le lien avec une antique pratique romaine est plus tenu.  

 

Les premières plantations auraient été faites dans la région l’Oise, à Senlis et à Chantilly. Aujourd’hui, c’est à Méréville (Essonne), que l’on célèbre le cresson au mieux, la ville étant devenue capitale du Cresson en 1963. 

 

Autre miracle de ces petites feuilles : leur note de poivre, légèrement corsé. Pour choisir au mieux ses feuilles, elles doivent être d’un vert franc et bien serrées. Laissez tomber celles qui auraient perdu leur couleur. Le cresson ne se conservera que deux à trois jours avant de perdre de sa superbe et de ses qualités. L’avantage est qu’il se déguste en salade, haché pour remplacer du persil... ou en soupe, un grand classique.

 

Il fut même mis en scène dans quelques chansons de salle de garde : 
 

Si les femmes pissaient du vinaigre,

Et chiaient du poivre moulu,

La salade serait bientôt faite,

Avec le cresson qui leur pousse au cul.


 

Probablement parce qu’on lui a reconnu des vertus en si grand nombre qu’il méritait bien d’être un peu malmené ? Le groupe Malicorne lui rendit toutefois un hommage plus poétique :

 

 

 

La plante est récoltée deux fois par an, et semée en avril puis en août : si l’envie vous prend, dans quelques d’aller visiter une cressonnière, plusieurs sont accessibles en région parisienne, et ravies de vous accueillir. À ce titre, un parcours découverte est proposé à Méréville directement, avec un départ depuis l’église même. « Une promenade bucolique vous attend le long de la Juine, et vous mènera progressivement vers les localités de Givramont, Renonval, Glaire, Semainville et Courcelles. Le sentier découverte débute sur le chemin de Malmorts, aux abords du charmant moulin de Semainville. Étape par étape, vous en apprendrez davantage sur la flore locale. Les tant attendues cressonnières se dévoileront du côté de Courcelles ; au même endroit, la villa Paul et celle de la Pisciculture méritent une courte halte. »

 

Le tout sur trois kilomètres avec deux heures de trajet, et accessible à tous.


Et les récoltes de cresson de jardin ne sont probablement pas finies, il vous est peut-être possible d’en trouver, sinon, vous mettrez la main sur du cresson alénois, que l’on retrouve toute l’année. Actuellement, c’est le cresson fontaine, le plus connu, qu’on retrouve entre avril et octobre, qui sera la star des étals... Pourquoi se priver ?

 

Mots-clés : cresson feuilles - vertus vitamines - culture histoire plante

 

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